
La transition énergétique mondiale propulse les projets d’énergie solaire à grande échelle au premier plan des stratégies de décarbonation. En France et dans l’Union européenne, ces installations représentent un levier majeur pour atteindre les objectifs climatiques fixés par l’Accord de Paris. Toutefois, leur déploiement se heurte à un cadre juridique complexe, fragmenté entre droit de l’urbanisme, droit de l’environnement et réglementations sectorielles. Cette complexité juridique constitue souvent un frein pour les porteurs de projets confrontés à des procédures administratives multiples, des régimes d’autorisation variables et des contentieux potentiels. Face à ces enjeux, l’analyse du cadre normatif encadrant ces infrastructures énergétiques devient indispensable pour sécuriser leur développement.
Le cadre juridique international et européen des grands projets solaires
Le développement des installations solaires à grande échelle s’inscrit dans un environnement juridique façonné par des engagements internationaux contraignants. L’Accord de Paris de 2015 constitue le socle de cette architecture normative en fixant l’objectif de limiter le réchauffement climatique bien en-deçà de 2°C. Pour concrétiser cet engagement, les États signataires doivent mettre en œuvre des contributions déterminées au niveau national (CDN) qui incluent généralement des objectifs de déploiement des énergies renouvelables. Ce cadre international est complété par les Objectifs de Développement Durable des Nations Unies, notamment l’ODD 7 qui vise l’accès à une énergie propre et abordable pour tous.
Au niveau européen, le Pacte vert (Green Deal) adopté en 2019 a considérablement renforcé les ambitions climatiques de l’Union. Dans ce sillage, la directive 2018/2001 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (RED II) fixe un objectif contraignant de 32% d’énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie d’ici 2030. Cette directive a été renforcée par le paquet législatif « Fit for 55 » qui porte désormais cet objectif à 40%. Pour faciliter le déploiement des grands projets solaires, l’Union européenne a adopté en 2022 le règlement REPowerEU qui désigne des « zones d’accélération » où les procédures d’autorisation sont simplifiées.
La jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) joue un rôle déterminant dans l’interprétation de ces textes. Dans l’arrêt PreussenElektra (C-379/98), la Cour a reconnu que les mécanismes de soutien aux énergies renouvelables étaient compatibles avec le droit de la concurrence européen. Plus récemment, dans l’affaire Ålands Vindkraft (C-573/12), elle a confirmé la possibilité pour les États membres de limiter leurs régimes d’aide aux installations situées sur leur territoire.
L’harmonisation progressive des cadres nationaux
Face à la diversité des approches nationales, l’Union européenne s’efforce d’harmoniser progressivement les cadres juridiques. La directive 2011/92/UE relative à l’évaluation des incidences de certains projets sur l’environnement impose des procédures standardisées pour les grands projets énergétiques. Par ailleurs, le règlement (UE) 2022/869 concernant les infrastructures énergétiques transeuropéennes établit des corridors prioritaires et des procédures accélérées pour les projets d’intérêt commun.
- Objectif européen : 40% d’énergies renouvelables d’ici 2030
- Création de « zones d’accélération » pour simplifier les autorisations
- Harmonisation des procédures d’évaluation environnementale
- Reconnaissance de la compatibilité des aides d’État pour les énergies renouvelables
Cette architecture juridique multilatérale crée un socle commun qui influence directement les législations nationales. Toutefois, sa mise en œuvre reste hétérogène selon les États membres, créant parfois des distorsions concurrentielles entre les territoires et complexifiant le développement de projets transfrontaliers.
Le régime d’autorisation des centrales solaires photovoltaïques en droit français
En France, l’implantation d’une centrale solaire de grande envergure nécessite de naviguer à travers un labyrinthe d’autorisations administratives. Le régime applicable varie sensiblement selon les caractéristiques techniques du projet, sa localisation et sa puissance installée. La loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite loi « Climat et Résilience ») a modifié ce cadre pour accélérer le déploiement des énergies renouvelables.
Pour les centrales au sol d’une puissance supérieure à 50 MWc, un permis de construire délivré par le préfet est obligatoire conformément à l’article R.421-1 du Code de l’urbanisme. Cette autorisation s’accompagne généralement d’une étude d’impact environnemental en application de l’article R.122-2 du Code de l’environnement. Les projets situés en zone agricole doivent obtenir une dérogation spécifique, la loi n°2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables ayant assoupli les conditions d’implantation sur ces terrains.
Le raccordement au réseau électrique constitue une étape critique soumise à un cadre juridique distinct. La procédure de raccordement est encadrée par le décret n°2008-386 du 23 avril 2008 relatif aux prescriptions techniques générales de conception et de fonctionnement pour le raccordement d’installations de production aux réseaux publics d’électricité. La Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) joue un rôle prépondérant dans la détermination des coûts de raccordement à travers ses délibérations tarifaires.
Les procédures d’autorisation environnementale
Depuis l’ordonnance n°2017-80 du 26 janvier 2017, les grands projets solaires sont soumis à une autorisation environnementale unique qui regroupe plusieurs procédures auparavant distinctes. Cette autorisation intègre notamment :
- L’autorisation au titre de la loi sur l’eau
- L’autorisation de défrichement le cas échéant
- La dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées
- L’autorisation de travaux en site classé
La procédure d’instruction, détaillée aux articles R.181-1 et suivants du Code de l’environnement, comprend une phase d’examen (4 mois), une enquête publique (1 à 2 mois) et une phase de décision (2 à 3 mois). Ce délai global de 9 mois peut être prolongé en cas de complexité particulière du dossier. La jurisprudence administrative a progressivement précisé les contours de cette procédure, comme l’illustre la décision du Conseil d’État n°416221 du 27 septembre 2018 qui a rappelé l’obligation d’une évaluation environnementale approfondie pour les projets susceptibles d’affecter significativement les milieux naturels.
Le contentieux administratif représente un risque majeur pour les porteurs de projets. Pour y remédier, le décret n°2018-1054 du 29 novembre 2018 a instauré un régime contentieux spécifique avec notamment la compétence directe des Cours administratives d’appel en premier et dernier ressort pour les litiges relatifs aux installations de production d’énergie renouvelable. Cette réforme vise à réduire les délais de jugement et à sécuriser juridiquement les projets.
Les mécanismes de soutien économique et leur encadrement juridique
Le développement des centrales solaires à grande échelle repose largement sur des mécanismes de soutien économique dont l’encadrement juridique s’est considérablement sophistiqué. En France, ces dispositifs ont évolué d’un système de tarifs d’achat garantis vers des mécanismes plus concurrentiels conformes au droit européen des aides d’État.
Le principal mécanisme de soutien est désormais le complément de rémunération, instauré par la loi n°2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Ce dispositif, codifié aux articles L.314-18 à L.314-27 du Code de l’énergie, consiste en une prime versée au producteur en complément de la vente directe de l’électricité sur le marché. L’attribution de ce soutien s’effectue principalement via des procédures de mise en concurrence organisées par la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) sous forme d’appels d’offres.
Ces mécanismes sont strictement encadrés par le droit européen des aides d’État. Les lignes directrices de la Commission européenne concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie (LDAEE) fixent les conditions de compatibilité de ces soutiens avec le marché intérieur. La notification préalable à la Commission est généralement requise, bien que des exemptions existent sous le régime du Règlement général d’exemption par catégorie (RGEC) n°651/2014 modifié.
Les nouveaux modèles contractuels
Au-delà des mécanismes de soutien public, de nouveaux modèles contractuels émergent pour sécuriser les investissements dans les grands projets solaires. Les contrats d’achat d’électricité de long terme (Power Purchase Agreements ou PPA) permettent une commercialisation directe de l’électricité entre producteurs et consommateurs. Le régime juridique de ces contrats a été clarifié par l’ordonnance n°2021-236 du 3 mars 2021 qui les a intégrés dans le Code de l’énergie.
Ces contrats soulèvent néanmoins des questions juridiques complexes :
- Qualification juridique au regard du droit des contrats
- Traitement fiscal des flux financiers
- Articulation avec les règles du marché de l’électricité
- Garanties d’origine et traçabilité de l’électricité verte
La jurisprudence relative à ces nouveaux mécanismes reste embryonnaire mais devrait se développer à mesure que ces contrats se multiplient. La Cour de cassation n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer sur leur nature juridique exacte, laissant planer une certaine insécurité juridique pour les cocontractants.
Parallèlement, le cadre fiscal applicable aux grands projets solaires constitue un élément déterminant de leur viabilité économique. La fiscalité locale (taxe foncière, contribution économique territoriale) peut représenter une charge significative que les porteurs de projets doivent anticiper. L’Imposition Forfaitaire sur les Entreprises de Réseaux (IFER), codifiée à l’article 1519 F du Code général des impôts, s’applique spécifiquement aux installations photovoltaïques avec un tarif fixé à 7,82 € par kilowatt de puissance installée pour 2023.
Les enjeux fonciers et d’urbanisme des grands parcs solaires
L’implantation des centrales solaires à grande échelle soulève d’épineux défis fonciers et urbanistiques. Ces installations nécessitent des surfaces considérables, souvent plusieurs dizaines d’hectares, ce qui génère des tensions d’usage avec d’autres activités, notamment agricoles. Le Code de l’urbanisme encadre strictement les possibilités d’implantation selon le zonage des terrains.
En zone agricole (A) des Plans Locaux d’Urbanisme (PLU), l’implantation était traditionnellement très restreinte. Toutefois, la loi n°2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables a assoupli ce cadre en permettant l’installation de centrales solaires sur des terres agricoles sous certaines conditions, notamment la démonstration d’une compatibilité avec l’activité agricole (agrivoltaïsme). Cette évolution législative répond à la jurisprudence administrative qui avait progressivement admis cette compatibilité, comme l’illustre l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes n°19NT02389 du 12 mars 2021.
Pour les friches industrielles et les sites dégradés, le cadre est plus favorable. La circulaire du 18 décembre 2009 relative au développement et au contrôle des centrales photovoltaïques au sol encourage explicitement la valorisation de ces espaces. Cette orientation a été renforcée par la loi Climat et Résilience qui impose d’équiper d’installations d’énergies renouvelables ou de toitures végétalisées au moins 30% de la surface des parkings extérieurs de plus de 1 500 m².
Les outils juridiques de maîtrise foncière
La sécurisation foncière constitue un enjeu majeur pour les porteurs de projets. Plusieurs instruments juridiques peuvent être mobilisés :
- Le bail emphytéotique (articles L.451-1 à L.451-13 du Code rural)
- Les servitudes pour le passage des câbles et l’accès aux installations
- La promesse de bail pendant la phase de développement
- Le bail SAFER pour les terrains agricoles
La qualification des installations photovoltaïques au regard du droit des biens suscite des interrogations. Dans un arrêt du 19 juin 2013 (n°12-17.591), la Cour de cassation a considéré que les panneaux solaires incorporés à un bâtiment constituaient des immeubles par destination, ce qui a des conséquences significatives en matière de garanties et de transfert de propriété.
Au-delà de ces aspects privatistes, les collectivités territoriales disposent d’outils d’intervention foncière spécifiques. L’article L.300-1 du Code de l’urbanisme leur permet de mener des actions d’aménagement ayant pour objet « de mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l’habitat, d’organiser le maintien, l’extension ou l’accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d’enseignement supérieur, de lutter contre l’insalubrité et l’habitat indigne ou dangereux, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels ». Ce fondement juridique permet notamment la création de Zones d’Aménagement Concerté (ZAC) dédiées aux énergies renouvelables.
La planification territoriale joue un rôle croissant dans le développement des projets solaires. Les Schémas Régionaux d’Aménagement, de Développement Durable et d’Égalité des Territoires (SRADDET) fixent désormais des objectifs contraignants en matière d’énergies renouvelables que les documents d’urbanisme locaux doivent prendre en compte. Cette articulation des normes d’urbanisme crée un cadre favorable mais complexe que les opérateurs doivent maîtriser.
Vers une sécurisation juridique renforcée des grands projets solaires
Face à la complexité du cadre juridique actuel et aux objectifs ambitieux de transition énergétique, plusieurs évolutions normatives visent à sécuriser et accélérer le déploiement des grands projets solaires. Ces réformes s’articulent autour de trois axes principaux : la simplification administrative, la sécurisation contentieuse et l’amélioration de l’acceptabilité sociale.
La simplification administrative constitue un levier majeur pour accélérer les projets. La loi n°2023-175 du 10 mars 2023 a introduit des mesures significatives comme la reconnaissance de « raison impérative d’intérêt public majeur » pour les projets d’énergies renouvelables, facilitant l’obtention de dérogations environnementales. Cette loi a instauré une procédure de « permis enveloppe » permettant d’autoriser un projet dont les caractéristiques précises peuvent évoluer dans certaines limites sans nouvelle autorisation. Par ailleurs, le décret n°2022-1673 du 27 décembre 2022 a considérablement réduit les délais d’instruction des demandes de raccordement au réseau électrique.
Sur le plan contentieux, plusieurs mécanismes visent à réduire l’insécurité juridique. La modulation dans le temps des effets des annulations contentieuses, consacrée par la jurisprudence Association AC! du Conseil d’État (11 mai 2004, n°255886), permet désormais de limiter les conséquences d’une annulation juridictionnelle. De même, l’article L.600-5-1 du Code de l’urbanisme offre au juge la possibilité de surseoir à statuer pour permettre la régularisation d’un vice affectant une autorisation d’urbanisme, évitant ainsi l’annulation pure et simple.
L’implication des parties prenantes comme facteur de sécurisation
L’acceptabilité sociale constitue un facteur déterminant de sécurisation juridique. Les procédures participatives, au-delà de leur caractère obligatoire, permettent d’anticiper et de résoudre les oppositions potentielles. La Commission Nationale du Débat Public (CNDP) joue un rôle croissant dans l’organisation de ces concertations préalables. Pour les projets solaires de grande ampleur (supérieurs à 300 M€), une saisine obligatoire est prévue par l’article L.121-8 du Code de l’environnement.
Les mécanismes de partage de la valeur avec les territoires constituent également un levier d’acceptabilité. Plusieurs dispositifs juridiques facilitent cette redistribution :
- Le financement participatif encadré par le Code monétaire et financier
- La participation des collectivités locales au capital des sociétés de projet (article L.2253-1 du CGCT)
- Les communautés énergétiques introduites par la directive européenne RED II
- Le partage territorial de l’IFER prévu par l’article 1609 nonies C du CGI
La jurisprudence joue un rôle majeur dans la clarification du cadre juridique applicable. Le Conseil d’État, dans sa décision Association France Nature Environnement du 28 décembre 2022 (n°463563), a précisé les conditions d’application du principe d’utilité publique aux projets d’énergies renouvelables. Cette qualification facilite notamment les procédures d’expropriation et l’institution de servitudes d’utilité publique.
Les contrats de filière signés entre l’État et les industriels contribuent également à la sécurisation juridique en définissant des engagements réciproques. Ces accords, bien que dépourvus de valeur normative directe, influencent l’élaboration des textes réglementaires et créent un cadre de confiance pour les investisseurs. Le dernier contrat de filière solaire signé en 2021 prévoit notamment un volume minimal d’appels d’offres jusqu’en 2026, offrant ainsi une visibilité accrue aux acteurs économiques.
L’ensemble de ces évolutions dessine une tendance de fond vers un droit plus favorable aux énergies renouvelables, où l’impératif de transition énergétique justifie des adaptations significatives du cadre juridique traditionnel. Cette nouvelle hiérarchisation des normes et des intérêts pourrait préfigurer l’émergence d’un véritable droit spécial des énergies renouvelables.
Perspectives d’évolution et enjeux futurs du cadre normatif
Le cadre juridique encadrant les grands projets solaires continue d’évoluer pour répondre aux défis de la transition énergétique. Plusieurs tendances se dessinent qui vont façonner l’environnement normatif dans les prochaines années. Ces évolutions concernent tant le droit substantiel que les procédures administratives et contentieuses.
La planification spatiale des énergies renouvelables constitue un axe majeur de développement juridique. La loi n°2023-175 a instauré un dispositif de « planification territoriale » qui impose aux communes d’identifier des « zones d’accélération » propices au développement des énergies renouvelables. Cette approche, inspirée du modèle allemand des « Konzentrationszonen« , vise à concilier le développement rapide des projets avec une meilleure maîtrise de leurs impacts territoriaux. Le décret n°2023-764 du 10 août 2023 précise les modalités d’élaboration de ces zones, dont la délimitation devra être achevée avant le 31 décembre 2024.
L’évolution des mécanismes de soutien économique constitue un second axe de transformation. Le système actuel de complément de rémunération devrait progressivement évoluer vers des dispositifs plus proches du marché, conformément aux orientations de la Commission européenne. Les contrats pour différence bilatéraux (two-sided CfD), déjà expérimentés dans plusieurs pays européens, pourraient être introduits en France. Ces mécanismes, qui prévoient des reversements du producteur à l’État en cas de prix de marché élevés, permettraient de limiter le coût du soutien public tout en maintenant une sécurisation des investissements.
Les défis juridiques émergents
Le développement massif du solaire soulève de nouvelles problématiques juridiques qui nécessiteront des adaptations normatives. La question du démantèlement et du recyclage des installations en fin de vie devient prégnante. Si la directive 2012/19/UE relative aux déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) s’applique déjà aux panneaux photovoltaïques, un cadre plus spécifique pourrait émerger. En France, l’article R.543-172 du Code de l’environnement impose déjà aux producteurs d’assurer la collecte et le traitement des panneaux usagés via l’éco-organisme PV Cycle.
L’articulation entre développement solaire et préservation de la biodiversité constitue un autre défi majeur. La séquence Éviter-Réduire-Compenser (ERC), codifiée à l’article L.110-1 du Code de l’environnement, s’applique aux projets solaires mais son interprétation suscite des débats. La notion de « compensation écologique » pourrait connaître des évolutions significatives, notamment à travers le développement de mécanismes de compensation mutualisée via des sites naturels de compensation.
Plusieurs innovations juridiques sont envisageables pour faciliter le déploiement des projets tout en renforçant leur acceptabilité :
- Création d’un permis environnemental unique européen pour les grands projets transfrontaliers
- Développement de contrats territoriaux associant porteurs de projets, collectivités et citoyens
- Instauration d’un droit de préférence local pour l’investissement dans les projets d’énergie renouvelable
- Mise en place d’un fonds de garantie pour couvrir les risques juridiques résiduels
La digitalisation des procédures administratives représente un levier majeur de simplification. Le développement de plateformes numériques intégrées permettrait d’accélérer l’instruction des dossiers et de faciliter le suivi des projets. La blockchain pourrait être utilisée pour sécuriser les contrats d’achat d’électricité et garantir la traçabilité de l’électricité verte, comme l’expérimente déjà l’Agence ORE (Opérateurs de Réseaux d’Énergie).
Enfin, la question du statut juridique de l’électricité produite par les centrales solaires mérite d’être approfondie. La qualification juridique de cette électricité, notamment lorsqu’elle est stockée, reste incertaine. S’agit-il d’un bien meuble corporel classique ou d’un bien sui generis soumis à un régime particulier ? Cette question, apparemment théorique, a des implications pratiques considérables en matière de fiscalité, de garanties ou encore de responsabilité.
Ces évolutions dessinent progressivement les contours d’un droit de l’énergie solaire plus mature, mieux adapté aux spécificités de cette filière et aux objectifs de la transition énergétique. Toutefois, ce processus de maturation juridique devra préserver un équilibre délicat entre accélération des projets, protection de l’environnement et acceptabilité sociale.